Claire Rozette est sage-femme coordinatrice du plateau des consultations à l’hôpital de Necker à Paris. En 2021, elle a suivi la formation diplômante interuniversitaire (DIU) intitulée « Prise en charge des violences faites aux femmes vers la bientraitance », conçue par l’association Un maillon manquant. Son objectif : aider les soignants à déceler les situations de violence et mieux accompagner les femmes.
Qu’est-ce qui vous a menée à intégrer ce DIU dans votre parcours professionnel ?
Claire Rozette : J’ai passé les dix-sept premières années de ma carrière en Angleterre, où les cliniciens sont très sensibilisés à l’approche des femmes victimes de maltraitances, en situation de vulnérabilité, et à la protection de l’enfance. Quand je suis revenue en France en 2017, j’ai commencé à travailler à la maternité de l’hôpital Necker à Paris. La sage-femme coordonnatrice a contribué à l’élaboration de ce DIU et y a participé en tant qu’étudiante. Nous avons beaucoup échangé ensemble et il m'a paru important d'approfondir mes connaissances afin de répondre au mieux à la demande de ces femmes vulnérables.
Quels enseignements comporte ce DIU ?
C. R. : Ce DIU permet de prendre conscience des conséquences des violences sur la santé globale, au-delà des impacts neurologiques et psychiques attendus. Il met également en avant la prévention de leur transmission transgénérationnelle. En cela, la périnatalité est un moment charnière dans la vie d’une femme. Elle représente une fenêtre d’opportunité incroyable pour aborder ce sujet avec celles qui viennent en consultation dans nos services.
Le DIU apporte aussi une connaissance du cadre juridique et social existant pour épauler ces femmes dans leur parcours. Enfin, il crée une dynamique de réseau entre professionnels qui perdure bien après la formation. C’est un élément crucial pour ne pas nous retrouver seuls quand nous recevons les histoires complexes de celles qui s’ouvrent à nous.
De quelle façon ce DIU a-t-il modifié votre pratique professionnelle ?
C. R. : Ce cursus a surtout renforcé ma conviction que les soignants jouent un rôle essentiel dans la détection et l’accompagnement des maltraitances faites aux femmes et aux enfants. Je le savais déjà, mais, avec ce DIU, j’ai acquis la certitude qu’en posant les bonnes questions et en instaurant un climat de confiance, les victimes parlent. À la suite de cette formation, nous avons notamment adapté l’autoquestionnaire vulnérabilités et addictions de l’association GEGA, en y ajoutant une section sur les violences.
D’autre part, cette formation m’aide aujourd'hui à décrypter les cas de certaines femmes qui viennent aux urgences à répétition, avec des symptômes diffus, et que nous avons parfois du mal à orienter. La plupart du temps, elles vivent des situations de violence et c'est une manière pour elles d'envoyer des appels au secours. Ce DIU m’a donné l’assise pour guider ces femmes, grâce au réseau sur lequel je sais pouvoir m’appuyer. Elles ont besoin de soutiens multiples et nous leur proposons des béquilles sur lesquelles elles pourront compter.
« Les violences subies durant l’enfance ou l’adolescence ont des conséquences sur l’état de santé global de la personne à l’âge adulte. Dépister et prendre en charge médicalement les maltraitances est une question de santé publique »
Dr Perrine Millet, Ph. gynécologie obstétrique, coordinatrice pédagogique du DIU Prise en charge des violences faites aux femmes vers la bientraitance et présidente de l’association Un maillon manquant. Elle est à l’origine de la création du DIU, aujourd’hui porté par les Universités Grenoble-Alpes et Paris-Cité.
Pour en savoir plus et vous inscrire au DIU « Prise en charge des violences faites aux femmes vers la bientraitance », rendez-vous ici.
Claire Rozette