Les acheteurs font les courses de l'hôpital avec pour mission d'obtenir le meilleur produit au meilleur prix. Au CHU de Rennes (35), Sophie Harel encadre une équipe de 20 personnes.

COMMENT ÊTES-VOUS DEVENUE ACHETEUSE ?

J'ai débuté ma carrière dans une entreprise de négoce en produits d'emballage, en région parisienne. J'avais un profil plutôt gestionnaire et commercial. Puis j'ai voulu me rapprocher de ma Bretagne natale. Je suis devenue acheteuse en rejoignant le centre de lutte contre le cancer François-Baclesse, à Caen (14). Pour continuer à évoluer, j'ai repris mes études. En formation continue (VAE), j'ai décroché un master 2 en gestion de production, logistique et achats. Ce qui m'a permis d'être recrutée par le CHU de Rennes en 2012. D'abord comme acheteuse puis comme responsable des achats.

QU'ACHÈTE-T-ON À L'HÔPITAL ?

Vraiment de tout ! Du matériel médical, des médicaments mais aussi des produits alimentaires, des logiciels, des services de nettoyage, des prestations de gardiennage, de blanchisserie, de travaux... Au CHU de Rennes, les achats représentent un budget de 212 M€ par an dont 60 à 65 % pour le seul poste pharmacie.

QUELLES SONT LES MISSIONS D'UN ACHETEUR ?

Notre objectif est d'acheter le meilleur produit ou service au meilleur prix. Mais pas n'importe comment. Vu les volumes en jeu, le code des marchés publics nous impose de mettre en concurrence nos fournisseurs via des appels d'offres. L'achat doit se faire en toute équité et transparence. Tout le travail consiste à construire avec nos "prescripteurs experts" un cahier des charges précis, à regarder ce qui existe sur le marché (sourcing), à observer ce qui se fait ailleurs (benchmarking)... L'acheteur analyse les offres des candidats, retient la meilleure et suit l'exécution des marchés. Jusqu'à infliger des pénalités au fournisseur si celui-ci ne remplit pas ses obligations.

QUELLES SONT VOS CRITÈRES D'ACHAT ?

Forcément, le prix compte beaucoup. Mais l'aspect technique est aussi capital. J'ai appris à me méfier des prix trop bas. Du matériel pas cher, c'est souvent moins solide, plus souvent en panne... Tout dépend ce qu'on achète. Les sacs poubelles ? On peut prendre les moins chers ; ça ne vaut pas pour le scanner ! Nous sommes très vigilants sur la restauration. Nous privilégions au maximum les produits bio et locaux. Le CHU de Rennes est le premier employeur de Bretagne et un très gros client. Nous devons acheter "responable".

COMMENT EST ORGANISÉ VOTRE SERVICE ?

Je coordonne une équipe de 20 salarié(e)s, composée de secrétaires, de gestionnaires et d'acheteurs, secondés par des assistants achats. Les gestionnaires passent les commandes d'approvisionnement. Ils liquident les factures. Les assistants achats préparent et suivent l'exécution des marchés. Chaque acheteur est responsable d'une filière : les travaux, l'informatique, la pharmacie, la biologie, le médical ainsi que les frais généraux et hôteliers. Il travaille en lien étroit avec la cellule juridique, les techniciens et les professionnels de santé de l'hôpital. Mais seul un pharmacien peut passer commande de médicaments.

QUEL EST VOTRE STATUT ?

Je suis contractuelle en CDI, recrutée au grade d'ingénieur hospitalier - catégorie A.

QUELLES SONT LES QUALITÉS REQUISES POUR EXERCER CE POSTE ?

Il faut être à l'écoute de nos "clients" que sont les directions, les personnels médicaux ou les cadres infirmiers. Il s'agit de bien comprendre leurs besoins, leurs contraintes. Il faut aussi rester à l'affût de l'innovation, être toujours en contact avec les fournisseurs. Je me déplace donc beaucoup sur les salons. Un acheteur doit savoir négocier mais aussi être force de proposition. L'achat est un acte technique. Mais la dimension humaine est importante. J'aurais pu faire carrière dans le privé. Mais j'ai choisi le service public. Je n'achète pas pour enrichir des actionnaires. J'achète pour servir l'intérêt général, améliorer la qualité des soins et le confort d'un séjour à l'hôpital.

Propos recueillis par Olivier Brovelli

Comment évolue le métier ?

Le temps où chaque service achetait dans son coin est révolu. Le métier se professionnalise. On centralise, on standardise, on mutualise les commandes, on limite les stocks... On cherche à réaliser des économies sans perdre en qualité. Depuis le 1er janvier 2017, le CHU de Rennes est l'établissement "pivot" d'un groupement hospitalier de territoire (GHT), composé de dix établissements de santé. On est plus fort quand on achète à plusieurs.

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