Ils sont près de 122 341 infirmiers libéraux (IDEL) à exercer aujourd’hui en France. Mais attention, être libéral ne signifie pas faire ce que l’on veut et comme on veut. L’exercice libéral est soumis à des règles et des obligations qu’il est bon de connaître avant de démarrer.

 

S’ils exercent toujours majoritairement à l’hôpital public, les infirmiers sont de plus en plus à être séduits par l’idée de se lancer sous le statut de travailleur indépendant. Mais être à la fois infirmier et chef d’entreprise, ne s’improvise pas.

10 conditions pour devenir infirmier libéral

Vous devez :

  • Etre titulaire d’un diplôme d’État d'infirmier obtenu en France, en Suisse ou dans un État membre de l’Union européenne.
  • Avoir une certaine expérience professionnelle (dans l’un des États membres de l’Union européenne ou en Suisse) et pouvoir justifier d’un minimum de 24 mois d’exercice (3 200 heures de travail) effectif pendant les 6 années précédant la demande dans les établissements répondant aux critères fixés par la convention. Si vous n’avez pas exercé au cours des 6 dernières années, l’expérience requise est plus importante, il vous faudra 36 mois d’expérience professionnelle.
  • Etre inscrit à l’Ordre National des Infirmiers. C’est une obligation depuis 2016.
  • Choisir un lieu d’installation. Le territoire a été découpé en 5 zones dont 2 devront appeler votre vigilance : les zones sur-dotées dans lesquelles le nombre d’infirmières libérales en fonction est déjà très important et où la demande d’installation ne pourra aboutir qu’à la suite d’une cessation d’activité d’une infirmière libérale déjà installée. Les zones sous-dotées à l’inverse peuvent vous apparaître avantageuses car des mesures incitatives ont été mises en place afin d’encourager le passage en libéral. Il faut contacter la caisse d’Assurance maladie du lieu d’installation envisagé afin de connaître la qualification de la zone et les éventuelles mesures incitatives proposées aux infirmiers libéraux.
  • Faire enregistrer votre diplôme d’infirmier à l’Agence Régionale de Santé (ARS). Vous obtiendrez ainsi votre numéro ADELI.
  • Vous enregistrer à la Caisse primaire d’Assurance maladie (CPAM) du département d’exercice pour obtenir votre carte professionnelle de santé.
  • Déclarer votre début d’activité libérale au centre de formalités des entreprises (CFE), situé à l’URSSAF du lieu d’exercice, dans les huit jours suivant votre création d’entreprise.
  • Vous affilier à la CARPIMKO (Caisse autonome de retraite et de prévoyance des Infirmiers, Masseurs-Kinésithérapeutes, Pédicures-Podologues, Orthophonistes et des Orthoptistes), organisme d’assurance vieillesse spécialisé dans les auxiliaires médicaux. La déclaration doit se faire dans le mois qui suit le début d’exercice.
  • Souscrire à une assurance de responsabilité civile et professionnelle (RCP) rendue obligatoire par la loi 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de soins.
  • Il est fortement recommandé d’adhérer à une association de gestion agréée (AGA). En effet, cela vous fera bénéficier d’un certain nombre d’avantages, notamment fiscaux.

Quels statuts choisir ?

Exercer l’activité d’infirmier en libéral implique de choisir une forme juridique. Vous devez choisir un statut approprié à votre modèle économique.

Vous pouvez :

  • Etre infirmier à votre compte en créant une entreprise individuelle 
  • imposée à l’impôt sur le revenu, dans la catégorie des Bénéfices Non Commerciaux (BNC).
  • créer une société, appelée Société d’Exercice Libéral (SEL), seul ou avec des associés si vous souhaitez ouvrir un cabinet à plusieurs professionnels.

En plus de votre statut juridique, vous pouvez :

  • Vous regrouper dans un local, avec un ou plusieurs confrères, en créant un Groupement d’intérêt Economique (GIE) pour mutualiser les équipements et les frais liés au cabinet d’infirmier.
  • Les infirmiers qui exercent à leur compte (entreprise individuelle) peuvent également se regrouper autour d’une Société Civile Professionnelle (SCP).
  • Les SEL sont régies par la réglementation des sociétés de capitaux (EURL/SARL(1), SASU/SAS(2)), mais elles subissent quelques dispositions et réglementations particulières liées à l’activité exercée (en matière de comptabilité, fiscalité...).

Paquerette Grange

 

(1)L’EURL est en la version individuelle de la SARL.
(2) La SASU est la version individuelle de la SAS. Si vous souhaitez vous associer ensuite, il est facile de passer d’une EURL à une SARL et d’une SASU à une SAS

 

Le conseil d’expert

Il convient de faire appel à un expert-comptable pour choisir le statut juridique le plus approprié, mais aussi vous permettre de vous décharger des tâches administratives pour être certain d’être en conformité avec la législation.

En effet, au-delà de l’aide à l’immatriculation, un expert-comptable connaissant parfaitement votre métier d’infirmier libéral pourra vous accompagner pour vos besoins spécifiques :

  • tenue de votre comptabilité ou vérification si vous effectuez vous-même la saisie,
  • production de vos comptes annuels,
  • déclarations fiscales, transmission au Centre de Gestion Agréé et aux impôts.

 

Chiffres clés

122 341 infirmiers libéraux (IDEL) sur les 681 459 infirmiers exerçant au 1er janvier 2018 (1).

48 700 cabinets d’infirmiers sur un total de 134 214 cabinets médicaux en France (2).

45 ans, c’est l’âge moyen des infirmiers libéraux.

87 % sont des femmes.

 

(1)DREES (Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques) 2018.

(2)dgOs, juillet 2018.

 

TÉMOIGNAGE

Laurence Thollet, 58 ans, est infirmière libérale associée dans un cabinet à Saint-Genis-Laval, petite commune de la métropole de Lyon, depuis 20 ans. Elle a travaillé auparavant 15 ans en hôpital.

« Je préfère l’appellation d’infirmière à domicile »

Pourquoi et quand avez-vous fait le choix d’exercer en libéral ?

En 1997, j’avais trois enfants, dont un en bas âge, et déjà 15 ans de carrière en milieu hospitalier. J’avais régulièrement changé de services : réanimation, urgences médicales et psychiatriques, chirurgie thoracique et viscérale, chirurgie ORL et médecine interne. J’ai toujours eu à cœur de découvrir de nouvelles pratiques et d’éviter la routine dans ma vie professionnelle.

Une voisine infirmière à domicile a été le détonateur. Nous échangions régulièrement sur son travail et elle m’a donné envie de sauter le pas.

J’ai rapidement trouvé un premier cabinet, dans le centre de Lyon, où j’ai travaillé comme infirmière collaboratrice pendant deux ans. J’y ai appris les 

rouages du soin à domicile. En 1999, je suis entrée dans un cabinet sur ma commune. Lorsqu’une collègue associée est partie, trois ans plus tard, j’ai racheté ses parts.

Qu’est-ce que cela change d’être associée ?

Cela ne change strictement rien au niveau de l’organisation. C’est une micro entreprise, il faut s’occuper de tout. Mais chacune tient sa propre comptabilité. Trois ont choisi de faire appel à un comptable, je fais ma propre compta, aidée par mon mari. C’est plus de travail, mais je dois avouer que le passage à la télétransmission a bien allégé notre charge.

Nous utilisons un logiciel Microconcept pour nos tournées.

Tous nos comptes sont validés par une Association de Gestion Agréée et nous avons un comptable pour le cabinet qui se charge de la déclaration commune d’impôts.

Pourquoi avez-vous choisi d’intégrer un cabinet ?

J’avais envie de travailler avec une équipe. Je n’ai jamais envisagé d’être infirmière à domicile seule. Je voulais conserver un temps partiel (je suis passée à mi-temps à la naissance de mon premier enfant). Je trouve aussi que c’est important de pouvoir échanger avec des collègues qui partagent les mêmes valeurs.

Quelles sont les principales difficultés et contraintes de l’exercice en libéral ?

La partie administrative de notre activité peut être compliquée au démarrage. Nous n’avons pas eu de formation dans notre cursus sur ce volet de notre métier. D’ailleurs lorsque nous accueillons des stagiaires infirmiers au cabinet, ils sont seulement évalués sur les soins. Je pense qu’un module de formation pourrait être proposé aux élèves infirmiers.

Je ne vois pas de grosses difficultés. Je dirais que c’est une autre approche du soin. Elle demande d’être tout le temps extrêmement vigilant et de maîtriser les contraintes horaires. Et cela peut créer un fond de stress permanent qu’on se doit de ne pas montrer à nos patients. C’est quelque chose dont on ne parle pas 

beaucoup dans notre métier : l’erreur. Et elle est omniprésente au quotidien. Elle demande une vigilance de tous les instants.

Et quelles sont les joies ?

Il y en a beaucoup ! Les liens qui s’établissent avec les patients que l’on suit depuis plusieurs années. On apprend à les connaître mais aussi leur univers, familial notamment.

J’aime le côté initiative aussi. En nous appuyant sur nos compétences et notre expérience, nous pouvons, en accord avec le médecin, modifier un protocole. Nous sommes un maillon essentiel de la chaîne à domicile en relation avec médecin de ville, hospitalier, pharmacien, laboratoire, services sociaux... ce qui renforce l'intérêt de notre métier.

Le fait de venir au domicile des gens permet de créer une relation différente. Les patients sont chez eux, donc moins démunis et moins dépendants. C’est vraiment une autre approche du soin. Et si je continue à travailler aujourd’hui avec autant de plaisir, c’est sans aucun doute parce que mon métier continue à me plaire.

 

 

 

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